- ALGÉRIE (HAUTES PLAINES D’)
- ALGÉRIE (HAUTES PLAINES D’)ALGÉRIE HAUTES PLAINES D’Sur plus de 150 000 kilomètres carrés, 6,7 p. 100 de l’Algérie, deux ensembles inégaux se partagent les Hautes Plaines.Avec, en 1987, 2 910 000 habitants — 12,5 p. 100 des Algériens —, sur 42 000 kilomètres carrés — 2 p. 100 du pays —, les Hautes Plaines constantinoises , marge atlasique abaissée jusque vers 800 mètres, crevée de reliefs anticlinaux et chevauchée par des nappes et écailles du Tell, bordent au nord-est monts du Hodna et Aurès. Les précipitations permettent, sur leurs piémonts bordiers et leur frange nord, la céréaliculture sèche. Monoculture extensive coloniale près des voies ferrées, elle fournissait la rente foncière citadine. Poursuivie, après 1962, par les domaines autogérés puis étatiques sur leurs 500 000 hectares, puis étendue, de 1974 à 1983, sur une surface voisine de coopératives de la révolution agraire, elle avait fait l’objet d’efforts de diversification, accompagnée de plantations, d’irrigations, de boisements, et orientée par le plan vers les blés, même, localement, le blé tendre, pour répondre aux besoins nationaux. La «restructuration», en imposant depuis 1983 une privatisation croissante, les a fait reculer aux dépens de l’«autosuffisance», et au profit de l’orge, dont le marché assure plus sûrement la rentabilité, et a délaissé l’entretien des bandes forestières.La croissance de la population, avant tout urbaine jusqu’aux années 1970, mais concernant aussi les campagnes durant la décennie de 1980, et portée de 2,3 p. 100 par an de 1966 à 1977 à 3,5 p. 100 de 1977 à 1987, avait plus qu’éliminé le déficit migratoire. Au lieu d’accumuler les chômeurs agricoles en interceptant partiellement l’exode rural, comme jusque dans les années 1960, les villes y avaient crû, durant la décennie de 1970, au fur et à mesure de la résorption de leur chômage et du besoin de travailleurs venus de l’extérieur, nés de la création d’industries, d’équipements (quatre universités) et de services générateurs d’emplois par les investissements publics nationaux. Sétif, dotée de 6 000 emplois industriels (plastique), avait réduit son taux de croissance de 4,6 à 4,4 p. 100 avant 1987, mais non Batna (8 000 emplois dans le textile et les métaux), ni treize ville moyennes, dotées chacune de 1 000 à 2 500 emplois (complexe lainier à Aïn Beïda, Khenchela, Tébessa, carton et amiante-ciment à Bordj Bou Arreridj, tréfilerie et compteurs à El-Eulma, etc.) au taux accru de 4,1 à 4,8 p. 100. Des dizaines de petites villes ne se sont développées — voire urbanisées — depuis 1980, et souvent au rythme de 7 à 8 p. 100 par an, que du fait d’une industrialisation parfois plus tardive (Meskiana, Ngaous...); plus souvent, postérieurement, l’accroissement est dû à la seule concentration de ruraux locaux fixés par des lotissements et les services (poste, lycée, santé, etc.).Les villes de l’industrie avaient connu une croissance de l’emploi, doublé en vingt ans jusqu’à des taux d’activité de 18 à 21 p. 100 en 1987 et diffusé dans les campagnes. Les autres sont nées depuis lors, avec des taux souvent deux fois moindres, et le chômage rural est à nouveau transféré jusque dans celles du premier type, avec la mise en sommeil des activités en crise, l’écart croissant des niveaux sociaux que favorise encore l’essor de l’«informel».Les Hautes Plaines algéro-oranaises , aire synclinale relevée de 400 mètres à l’est, dans le Hodna, à 1 000 mètres à l’ouest, à la frontière marocaine, couvrent, du bourrelet forestier qui les séparent du Tell et les chaînons de l’Atlas saharien, 110 000 kilomètres carrés: les bassins des chotts , que ne coupe que l’oued Touil. Ces steppes semi-arides encroûtées, «pays du mouton» alfatier dégradé à l’époque coloniale par un surpâturage et un arrachage spéculatifs, ont connu une accélération de la croissance démographique, de 2,6 à 5,1 p. 100 par an de 1966-1977 à 1977-1987, et, avec un bilan migratoire devenu positif, le doublement du nombre d’habitants, déjà excessif en 1966 (1 640 000 en 1987).La révolution agraire est restée ici lettre morte; les industries du secteur public implantées tardivement, surtout à Msila, un peu à El-Bayadh — mais absentes dans les six autres villes moyennes —, et décentralisées de Sidi Bel Abbes à Ras el-Ma, n’ont laissé place qu’à la croissance ou à la naissance de petites villes du type spéculatif de l’est, avec des taux d’emploi souvent abaissés jusqu’à 10 ou 15 p. 100 du nombre d’habitants et un chômage accompagnant l’exode rural avant même que la crise aggravée ne le multiplie et substitue au travail frustration, trafic et violence. Leur gonflement à des taux annuels qui sont passés parfois de 6 à 8 p. 100 de 1966 à 1987 quand les taux des zones rurales elles-mêmes, passant de 0,8 à 4,6 p. 100, rejoignaient ceux des villes moyennes, en recul de 5,4 à 4,7 p. 100, est lié, ici presque exclusivement, à la concentration des lotissements, des services et d’activités non productives «informelles».L’«option Hauts Plateaux» de 1987 s’est bien avérée la diversion qu’elle était: non seulement la loi d’«accession à la propriété foncière agricole» suivant la cha‘riya , mais les autres formes d’appropriation des terres et l’abandon de la protection des terres contre les labours abusifs livrent de plus en plus la steppe alfatière à la spéculation, au défoncement lourd de ses sols pour répondre à l’attrait du «marché»; elles détruisent durablement la ressource la plus sûre d’un espace en fait surpeuplé, où aucun investissement productif ne vient atténuer la crise présente.
Encyclopédie Universelle. 2012.